L’allaitement prolongé : pourquoi… et pourquoi pas?
Article par Julie Bolduc, nutritionniste
Je l’avoue, je suis une extraterrestre. 🙂
L’allaitement m’a toujours intéressé, longtemps avant d’avoir des enfants.
J’ai même fait un stage en allaitement lors de mes études universitaires et j’ai été la présidente du comité allaitement de l’université!
Mais honnêtement, si on m’avait dit à ce moment-là que j’allais allaité mes enfants dépassé un an, j’aurais ri.
Et j’aurais trouvé la personne en face de moi complètement cinglée d’envisager que je puisse allaiter au-delà d’un an. Non, mais!
Dans notre pays, ce n’est pas nécessaire, on a l’abondance à tous les niveaux, l’eau est potable et de toute façon, j’allais retourner au travail après un an. Ça ne se fait pas d’allaiter et de travailler quand même!
Pourtant, aujourd’hui je réalise que j’ai allaité bien au-delà de ce que j’envisageais possible. Même au-delà de ce que je jugeais décent. Et ça s’est fait tout simplement, sans même m’en rendre compte. Je dois avouer par contre que je ne m’étais pas fixé d’objectifs de durée avant de commencer. À mon premier, je me suis dit que j’allais allaiter autant qu’il le voudrait et que je serais confortable de le faire. À ma grande surprise, j’ai allaité mon fils presque 3 ans. Et je ne l’ai pas laissé se sevrer naturellement, je l’ai sevré car j’allaitais sa petite sœur et que j’étais enceinte de la 3e. Oui, oui, vous avez bien lu. J’ai allaité mes deux premiers en tandem pendant 16 mois et, là-dessus, je l’ai fait en étant enceinte pendant 3 mois. Au grand désespoir de ma mère qui craignait que je m’épuise.
En fait, c’est plutôt le contraire qui se produit. Quand l’allaitement se passe bien, la prolactine sécrétée par l’allaitement permet à la mère de se rendormir beaucoup plus facilement après les boires de nuit. Par contre, il faut éviter de se lever, allumer une grosse lumière et changer bébé de couche. Ce sont les meilleurs gestes à poser pour se réveiller complètement et avoir de la difficulté à se rendormir malgré les effets de la prolactine. Durant le jour, si la mère se permet le repos, la prolactine combinée à l’ocytocine, qui a un effet apaisant, favorisent la somnolence et les siestes. Je vous l’accorde, rendu au 3e, les siestes durant la journée sont plus difficiles, mais prendre un moment où tout le monde est collé dans le lit aide à se reposer même sans dormir.
Un des arguments que j’ai entendu à plusieurs reprises alors que j’allaitais au-delà d’un an, c’est l’inutilité de la chose. Ma pédiatre était malheureusement la première à me le dire. Pourtant, le lait maternel s’adapte aux besoins du bébé et évolue en fonction de son âge. En plus de contenir les éléments nutritifs de base, protéines, glucides, gras, vitamines et minéraux, le lait maternel contient des facteurs de croissance, des substances antimicrobiennes et antivirales, des hormones, des anticorps, des enzymes et bien d’autres éléments qu’on ne connaît pas encore. Il joue un grand rôle dans le développement et le maintien du système immunitaire de l’enfant en plus de favoriser une croissance et un développement optimal. C’est une aide importante quand l’enfant commence la garderie et qu’il est soumis à un nouveau bassin de virus, microbes et bactéries. De plus, au-delà des propriétés du lait, la relation qui se crée entre la mère et son enfant lors de l’allaitement a un impact positif sur le développement de son autonomie. En effet, l’enfant comprend que sa mère sera toujours là et qu’il peut revenir vers elle quand il en ressent le besoin. Attention! Je ne dis pas que le non-allaitement ne permet pas de créer cette relation; simplement que l’allaitement la facilite.
Allaiter un bambin en public vous rend mal à l’aise. C’est normal! Ce n’est pas une situation fréquente dans notre société et j’avoue que, même si je ne me suis jamais empêchée d’allaiter mes tout-petits un peu partout, quand ils sont un peu plus grand, j’ai un certain malaise. L’avantage avec les bambins, c’est qu’ils comprennent un peu plus. Il est possible de développer un signe avec eux pour qu’ils puissent nous faire part de leur désir d’être allaité. Ou on peut tout simplement instaurer une routine qui favorise l’allaitement dans les moments où nous sommes à la maison.
Et avec le retour au travail? L’un des avantages de l’allaitement c’est que la quantité de lait s’adapte à la demande. Il est parfaitement possible d’allaiter seulement 2-3 fois par jour, par exemple, au lever, au retour du travail et avant le dodo. D’ailleurs, ces petits moments de rapprochements faciliteront la transition entre la maison et la garderie.
Mon meilleur conseil pour une nouvelle maman qui allaite : ne vous fixez pas d’échéancier. Laissez-vous porter au gré des jours et de ces petits moments collés avec votre trésor. Vous pourriez être surprise de voir où cela vous mènera…et si vous avez besoin de conseils, je suis là pour ça!