Manger selon ses gènes: voie de l’avenir ou réalité à nos portes?
Il n’y a pas si longtemps, l’idée loufoque que la diète optimale ne soit pas la même pour tout le monde ne nous serait pas venue à l’esprit. Les progrès de la nutrigénomique avance à pas de géant. Aujourd’hui, manger selon ses gènes est devenu technologiquement possible.
Manger selon ses gènes, pourquoi faire?
Nous devons radicalement revoir notre conception de la ‘diète idéale’, et de notre façon d’énoncer nos recommandations. On parle maintenant de plus en plus de nutrition personnalisée, de manger selon nos gènes, de polymorphisme de l’ADN. On se demande ce qui en ressortira!
En fait, la nutrigénomique est une réalité depuis des décennies. Il existe des centaines d’études qui associent diète et génétique, et même épigénétique. On ne parle plus de nutrigénomique seulement mais bien de la science ‘Omique’ en général, tellement il y a de variantes à ce domaine. La métabolomique, la microbiomique, la protéomique, la phénomique…les préfixes et suffixes se succèdent et nous en font perdre notre latin!
La Nutrigénomique : qu’est-ce que c’est?
La nutrigénomique est la science qui étudie comment les gènes peuvent influencer la manière dont les gènes d’un individu ou une population détermine les risques associés à l’alimentation ( sa nutrigénétique). Nous possédons tous un ensemble de gènes qui nous est propre. La séquence de gènes qui code pour l’expression d’une protéine se ressemble mais n’est pas tout-à-fait identique d’une personne à l’autre, même si elle possède le même gène. Nous appelons cela des variants génétiques, ou des polymorphismes.
La nutrigénomique à la rescousse?
Entre autres exemples, des solutions nutrigénomiques existent déjà pour améliorer les conditions de vie de notre espèce, et celles-ci pourraient déjà être mises en pratique pour éradiquer la malnutrition. Des semences de céréales fortifiées, par exemple en vitamine A ou en folates, pourraient permettre de corriger des carences qui affectent la qualité de vie de milliards d’individus, et qui mènent même à la mort de milliers d’enfants chaque jour.
Pour nous citoyens de pays industrialisés, c’est un peu le contraire. Notre diète est pleine de calories, mais sa densité nutritive a grandement diminué. Pour renverser la vapeur, une alimentation plus consciente n’est plus un luxe. En connaissant mieux les risques associés à notre génétique, on peut modifier son alimentation afin de consommer plus de ces nutriments que notre corps est moins efficace à absorber et moins de ces nutriments que nous éliminons moins bien.
Pour une approche préventive
Si on adopte une perspective préventive, ne serait-il pas bénéfique économiquement et socialement de pouvoir diminuer la maladie simplement en ajustant les besoins nutritionnels pour chaque individu? Vu les coûts de santé faramineux du système de santé, l’augmentation des maladies chroniques et l’échec de la médecine ‘curative’ actuelle à suffire à la tâche, tout ceci pointe vers la nécessité de revoir nos approches thérapeutiques. Du moins c’est ce que les défenseurs de la nutrigénomique avancent.
Deux côtés de la médaille
Comme Einstein ne savait pas que ses recherches rendaient possibles la bombe atomique, la nutrigénomique apportera du bon et du moins bon. Chose certaine, elle est déjà à nos portes et nous ne pouvons pas l’arrêter. Réjouissons-nous lorsqu’elle peut être utilisée à bon escient, comme pour contrer la faim dans le monde, ou ralentir la progression d’un cancer, ou avertir une personne que son mode de vie n’est pas compatible à sa santé.
Mais puisque ce qui a propulsé la science de la nutrigénomique aussi loin en avant c’est l’avènement de l’intelligence artificielle et les technologies de mapping des gènes, beaucoup de chercheurs se questionnent sur les impacts futurs pour notre société. Mais il n’est pas question que du futur. Vous pouvez faire faire la cartographie de vos gènes ou ceux de votre enfant dès sa naissance, et ce depuis plusieurs décennies déjà.
D’une simplicité étonnante
Un simple test de salive révélera pour vous ce que cachent vos gènes. Plusieurs des gènes testés sont d’ailleurs déjà disponibles à partir de prélèvement sanguins dans les hôpitaux, lorsque les médecins trouvent judicieux de les prescrire. La nutrigénomique est donc déjà partie intégrante de nos soins de santé. La différence avec les tests nutrigénomiques du commer
ce est qu’ils ne sont pas couverts par les plans d’assurances ou le régime d’assurance maladie. En contrepartie, vous n’avez besoin d’aucune prescription pour y avoir accès, et vos données ne sont pas partagées avec le réseau de la santé! A condition de choisir une compagnie responsable qui travaille avec des professionnels de la santé, et non pas des serveurs internet qui vendent des tests pour collecter vos données biométriques.
Des avantages concrets sur la santé
Pour ma part, savoir que mes filles et moi possédons une mutation d’un gène qui nous empêche de métaboliser efficacement l’acide folique a permis d’expliquer bien des malaises, dès lors réglés depuis que j’ai pris connaissance de ce fait. Un supplément quotidien en prévention nous évite les symptômes associées à la déficience d’absorption qui nous caractérise.
Côté exercice, surprise: Je fais partie des ultra-sprint ET ultra-endurance, ce qui es très rare. Je ne m’en serait jamais douté! Cela m’a vraiment donné le goût de reprendre certaines activités sportives que j’avais délaissé. Les 70 autres gènes testés ont révélés eux aussi des informations que je n’aurais jamais pu savoir autrement. C’est tout de même fascinant, et pas banal quand on y pense, de pouvoir en savoir autant sur nos chromosomes juste en crachant!
La santé: pas juste une question de gènes!
J’ai appris sur ma génétique et cela n’a pas changé ma vie…je ne mange pas plus de chocolat qu’avant. Et les gènes ne sont pas tout. L’environnement, en matière de santé, y est pour beaucoup! Mais je connais mes susceptibilités et celles de ma famille. Cela me rassure. Et même si je n’en fais pas une obsession, cela m’a quand même motivé à adopter quelques bonnes habitudes de plus.
Pas un diagnostic mais un facteur de motivation
Et c’est ce que les études révèlent. Les personnes qui se soumettent à un test nutrigénomique ont tendance à se sentir motivées à modifier leur mode de vie de façon favorable. Surtout lorsqu’elle réalisent qu’elles ont des prédispositions pour certaines maladies. Pour certains, cela explique des choses et offre des réponses qu’ils cherchaient depuis longtemps.
Ce n’est jamais un diagnostic en soi, et un test nutrigénomique devrait s’interpréter avec le conseil d’une nutritionniste qui s’y connait. Car quand on demande à nos gènes, ce n’est pas toujours clair comme une boule de cristal! Sans compter que comme un dit, certains squelettes doivent parfois rester dans le placard…Toute vérité n’est pas toujours bonne à dire! Jugement clinique et code de déontologie aidant, les nutritionnistes ne vous compteront pas de sornettes. Il y a des gènes pour lesquelles il n’existe pas assez de données probantes et c’est leur travail de vous en informer.
Le Human Genome Project
Mais il y a clairement une multitude de gènes pour lesquels il y a abondance de données probantes, grâce au Human Genome Project. Les gènes et leur mutations sont de nos jours répertoriés dans ce registre vraiment astronomique (https://www.ncbi.nlm.nih.gov/gtr/). D’ailleurs, les données sont couramment combinées à d’autres bases de données par le ‘machine learning’ (intelligence artificielle). Oui, les ordinateurs sont en train de nous scruter à la loupe et à certains égards, nous connaissent déjà mieux que nous-mêmes! Mais puisqu’ils sont là pour rester, autant que nous aussi nous puissions en profiter!
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Vous êtes un professionnel? Lisez cet autre article de Marie-France Lalancette sur le même sujet: Mise à jour en Nutrigenomique